Il peut arriver qu’une juridiction rende une décision ( jugement ou arrêt ) définitif ordonnant le partage d’une terre agricole , ou qu'un notaire délivre un acte de vente ou de donation portant sur un terrain de cette nature en violation des disposition légales et réglementaires précitées.Cette décision ou ce contrat n’opère transfert de propriété qu'après sa publication à la conservation foncière, et ce conformément aux dispositions de l'article 793 du Code Civil. Dans l'hypothèse où cette décision ou ce contrat serait déposé à la conservation foncière aux fins de publication au registre foncier ,est-il permis au conservateur foncier de refuser cette publication au motif que le morcellement du terrain agricole objet de l’acte de vente ou de la décision judiciaire entraînerait un changement dans la vocation agricole de ce terrain?
Cette question a été soumise au Conseil d'État qui lui a donné une solution appropriée dans deux arrêts , le premier daté du 28 mars 2019, dossier n° 129178, et le second daté du 25 mai 2023, dossier n° 194236. Les faits de la deuxième affaire sont les suivants: Un notaire a rédigé un contrat de vente portant sur des droits immobiliers indivis d’une superficie de 200 mètres carrés pris sur une superficie plus vaste. Ce contrat de vente a été déposé à la conservation foncière aux fins de publication mais le conservateur foncier a refusé de procéder à cette formalité estimant que la vente vidée dans le contrat notarié objet de la demande de publication aboutira à un changement de la vocation agricole du terrain ,et encouragerait la création d’un ensemble d’habitations non réglementaire. Suite à ce rejet émis par le conservateur foncier ,le bénéficiaire du contrat de vente assigna ce dernier devant le tribunal administratif de Mostaganem à l’effet d’annuler sa décision avec injonction de procéder à la publication du contrat de vente . Le tribunal administratif a fait suite à cette demande et a rendu un jugement en date du 19 mars 2019 faisant injonction au conservateur foncier de publier le contrat de vente. Suite à l’appel déposé par le ministre des finances représenté par le directeur des domaines , le Conseil d'État a rendu l’arrêt du 25 mai 2023 qui annule le jugement du tribunal administratif de Mostaganem du 19 mars 2019 et statuant à nouveau déboute l’intimé (le demandeur initial ) de son action tendant à faire injonction au conservateur foncier de publier le contrat de vente.
En application de la législation régissant les règles de cession et d'exploitation des terres agricoles, l’arrêt du Conseil d'État du 25 mai 2023 a jugé d’une part que les opérations immobilières portant sur ces terres ne doivent pas nuire à leur potentiel d'investissement, et d’autre part ne doivent pas aboutir à un changement de leur vocation agricole ni conduire à la formation de terrains dont la superficie serait en contradiction avec les normes de l’orientation foncière et ce conformément aux dispositions de l'article 55 de la loi n° 90-25 susvisée. Le Conseil d'Etat a également jugé que les mutations des propriétés foncière agricole et leur morcellement doivent s'effectuer dans le cadre de la superficie de référence tel que précisé dans le décret exécutif n° 97-490 susvisé.
En conséquence le Conseil d'État a jugé que le conservateur foncier a le droit et le devoir de rejeter la demande de dépôt d’un acte de mutation d’un terrain agricole en vue de sa publication si cette formalité aboutit à un changement de la vocation agricole de ce terrain . Il convient de souligner que le Conseil d'État a élargi les cas dans lesquels la publication d’un acte portant mutation d’un terrain agricole peut-être refusée .Ainsi si l’acte de mutation porte sur une petite superficie prise sur une terre agricole plus vaste , le conservateur foncier sera en droit de refuser la publication. Par cette extension des cas de refus de publication des actes portant mutation des terres agricoles , le Conseil d'État a donné force légale à la circulaire de la direction générale des domaines en date du 17 mars 2016 n° 03335, qui instruit les conservateurs fonciers de refuser la publication d’actes portant cession des droits indivis sur de terrains agricoles de petite superficie. Pour connaitre la nature du terrain objet de la cession , s’agit-il d’un terrain agricole ou d’un terrain constructible , il convient de se référer d’abord aux mentions de l’acte de propriété ( livret foncier , acte de notoriété ou autre ) qui précise cette nature et ensuite se faire délivrer par la commune une fiche de renseignement ou un certificat d’urbanisme indiquant les droits à construire et les servitudes de toutes natures affectant le terrain considéré.
Cette jurisprudence qui étend l’interdiction de la formalité de publication aux terrains de petites superficies pris sur une terre agricole , si elle est conforme à la loi qui par ailleurs est juste et équitable car tendant à préserver la vocation des terres agricoles et à éviter la création d’ensemble d’habitation anarchiques , par contre elle mettra en difficulté un grand nombre d’acquéreurs de ce genre de terrains qui ne pourront jamais publier leurs contrats de vente, et par ricochet ne pourront jamais se faire délivrer un permis de construire , et si une construction est érigée sans permis de construire l’immeuble construit sur ces terrains sera considéré comme construction illicite insusceptible de régularisation .En outre , l’utilisation autre qu’agricole d’une terre classée terre agricole ou à vocation agricole quelle que soit le mode d’utilisation ( construction, défrichement, dégradation …) constitue un délit puni d’une peine pouvant aller jusqu’à 5 années d’emprisonnement et 500 000 DA d’amende , et ce en application de l’article 87 de la loi n° 08-16 sus- citée.
Quant au premier arrêt du Conseil d’Etat daté du 28 mars 2019 dossier n° 129178 , il a statué sur des faites similaires ( contrat de vente portant sur une petite superficie de 150 m2 pris sur un terrain agricole plus vaste) et leur a donné la même solution.
1-2- Remise du titre de propriété par voie d’enquête foncière
Une personne peut avoir en sa possession un immeuble , quelle que soit sa nature ( terrain, maison, appartement , local ...) et l’ exploite depuis très longtemps sans pour autant disposer d'un acte de propriété. Ne pas avoir un acte de propriété sur un immeuble empêche son propriétaire d’en disposer librement notamment il ne peut ni le vendre , ni le donner ni l’hypothéquer car toute mutation d’un immeuble doit être vidé dans n acte dressé par devant notaire ,et exige nécessairement la production de l’acte de propriété ( livret foncier ou tout autre acte prouvant la propriété) . La loi permet à ce type de propriétaires d’immobiles qui n'ont pas d’acte de propriété mais qui en sont les possesseurs depuis un certain temps de régulariser la situation de ces immeubles à travers une procédure spéciale : la procédure de constatation du droit de propriété immobilière et de délivrance de titres de propriété par voie d’enquête foncière .Cette procédure spéciale est régie par la loi n° 07-02 du 27 février 2007 Ainsi que le décret exéutif n° 08-147 du 19 août 2008.
A condition que l’immeuble n’ait pas été soumis aux opérations de cadastre général , toute personne physique ou morale qui exerce une possession sur un immeuble, directement par elle-même ou par l'intermédiaire d'une autre personne , peut requérir l'ouverture d'une enquête foncière en vue de faire constater son droit de propriété et de se faire délivrer un titre de propriété. Les requêtes en ouverture d'enquête foncière sont adressées au responsable des services de la conservation foncière de wilaya territorialement compétent c’est à dire la conservation foncière de la wilaya du lieu de situation de l’immeuble. Le demandeur doit remplir les conditions de la possession prévues à l'article 524 du Code de procédure civile et administrative et à l'article 817 du Code civil, c'est-à-dire qu'il doit être en possession du bien depuis plus de 15 ans, et que cette possession soit paisible, publique , continue, non interrompue , non précaire et non équivoque.
S'il résulte de l'analyse des déclarations, dires et témoignages recueillis, des documents présentés et des investigations effectuées par l'enquêteur foncier, que le requérant exerce une possession de nature à lui permettre d'accéder au droit de propriété par prescription acquisitive , l'appartenance de l'immeuble objet de l'enquête foncière lui est reconnue, et sur cette base le responsable des services de la conservation foncière de wilaya prend une décision d'immatriculation foncière de l'immeuble objet de l'enquête foncière au nom du propriétaire déterminé qui sera transmise pour exécution au conservateur foncier territorialement compétent qui procèdera à l'immatriculation foncière qui consiste à publier au livre foncier les droits constatés au cours de l'enquête foncière. Le conservateur foncier établit consécutivement à l'exécution de cette formalité, un titre de propriété qu'il remet au responsable des services de la conservation foncière de wilaya aux fins de délivrance au requérant.
Par contre si l'enquête foncière n'aboutit pas c’est à dire s'il résulte de l'analyse des déclarations, dires et témoignages recueillis, des documents présentés et des investigations effectuées par l'enquêteur foncier, que le requérant n’ exerce pas une possession de nature à lui permettre d'accéder au droit de propriété par prescription acquisitive , le responsable des services de la conservation foncière de wilaya prend une décision motivée portant refus d'immatriculation foncière. La décision de refus est susceptible de recours devant le tribunal administratif dans le délai de 4 mois à compter de la notification de cette décision. Comme tout recours en annulation d’un acte administratif porté devant le tribunal administratif, l’action tendant à contester la décision du conservateur foncier qui rejette une demande d’immatriculation foncière par voie d’enquête foncière doit être dirigée contre la décision explicite ou tacite de refus d’immatriculation foncière.
Dans son arrêt du 28 février 2019, dossier n°128396, le Conseil d'Etat a précisé les modalités et les conditions de délivrance du titre de propriété dans le cadre de la loi n°07-02 susvisée. Premièrement, le Conseil d'État a jugé que le titre de propriété établi par le conservateur foncier par voie d’enquête foncière est un acte administratif, qu'il soit provisoire ou définitif, et qu’à ce titre, il est soumis au contrôle du juge , c'est-à-dire au contrôle du tribunal administratif. Quant aux conditions de délivrance de ce titre de propriété , le Conseil d'État a jugé que :
- le requérant doit exercer la possession sur l’immeuble dans les conditions fixées par les dispositions du Code civil, c'est-à-dire être en possession de l’immeuble depuis au moins 15 ans sans interruption conformément à l’article 827 du Code civil et dans le respect de l’article 808 du même code qui dispose : « La possession ne peut être fondée sur des acte de pure faculté ou de simple tolérance. La possession exercée par violence, clandestinement ou d’une façon équivoque ne peut avoir d’effet ».
- l’immeuble objet de la demande du titre de propriété par voie d’enquête foncière doit être situé dans une commune non cadastrée, c'est-à-dire non encore soumise aux opérations cadastrales dans le cadre de l'ordonnance n° 75-74 du 12 novembre 1975 portant établissement du cadastre général et institution du livre foncier et des dispositions des décrets n° 76-62 et 76-63 du 25 mars 1976 relatifs à l’établissement du cadastre général et à l’institution du livre foncier.
Il ressort du dossier traité par l’arrêt du Conseil d'Etat du 28 février 2019 que suite à une décision du conservateur foncier d’immatriculer un immeuble au profit d’un requérant à qui a été délivré un titre de propriété par voie enquête foncière , une action en annulation de cet titre de propriété a été engagée devant le tribunal administratif de Béchar au motif que la possession de l’immeuble par le bénéficiaire du titre de propriété ne remplit pas les conditions légales. Cette action a été rejetée par le tribunal administratif comme étant non fondée . Suite à l'appel de ce jugement , le Conseil d'État a rendu l’arrêt du 28fevrier 2019 qui a annulé le jugement attaquée et statuant à nouveau annule le titre de propriété délivré par le conservateur foncier au motif qu'il appert du dossier que le demandeur du titre de propriété par voie d’enquête foncière n'exerce pas la possession effective et caractérisée de l’immeuble objet de la demande d'ouverture d'enquête et de délivrance de titre de propriété , et qu’au surplus cet immeuble est situé dans une zone cadastrée.
2- Marchés publics
2-1-- Prescription des créances dues à des tiers par les institutions publiques résultant de l’exécution d’un marché public
En application des dispositions de l'article 16 de la loi n° 84-17 du 7 juillet 1984 relative aux lois de finances, toutes créances dues à des tiers par l'État, une wilaya ,une commune ou un établissement public bénéficiant de subventions budgétaires de fonctionnement sont prescrites et définitivement éteintes au profit de l’institution publique en cause ,lorsque les dites créances n’ont pas été dûment acquittées dans un délai de 4 ans à partir du premier jour de l’exercice pendant lesquelles elles sont devenues exigibles.
En vertu de cette disposition , si le cocontractant néglige de revendiquer le paiement des prestations effectuées dans le cadre de l’exécution d’un marché public contracté avec une institution publique , et si celle-ci refuse le paiement et que le cocontractant créancier recourt au tribunal administratif aux fins de voir condamner cette institution au paiement de cette créance , cette action en justice pourra être rejetée au motif de la prescription de la créance ,et ce en application de l’article l'article 16 de la loi n° 84-17 susvisée.
La question de la prescription des créances dues par les institutions publiques et les conditions de recevabilité de cette prescription ont été abordées par le Conseil d'Etat dans un arrêt en date du 04 mai 2018 dossier n° 123293. Dans ce dossier soumis au contrôle du Conseil Etat ,une société commerciale a fourni à la wilaya de Constantine des armoires pour meubler la résidence de la wilaye, et après exécution de cette prestation contractuelle par la fourniture de la marchandise avec établissement séance tenante d’un procès-verbal de réception daté du 11 janvier 2009 ainsi que dudépôt d’une facture datée du 30 mars 2009, la wilaya informa la société cocontractante de son refus de payer sa prestation au motif que le prix unitaire des armoires porté sur la facture ne correspond pas au prix unitaire convenu lors de la séance d’ouverture des plis et d’évaluation des offres . Suite à ce refus la société cocontractante décida en 2015 , c’est à dire 6 ans après l’exécution de la prestation et le dépôt de la facture , d’assigner la wilaya devant le tribunal administratif de Constantine à l’effet de voir condamner cette dernière au règlement de sa créance. Statuant sur cette demande , le tribunal administratif de Constantine débouta la société demanderesse au motif de prescription de la créance en constatant que la demanderesse n’a introduit son action qu’après expiration du délai de 4 ans fixé par la loi n° 84-17 sus visée qui en l’espèce court à compter du dépôt de la facture.
La société cocontractante a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal administratif de Constantine et, statuant sur ce recours , le Conseil d'Etat par son arrêt du 04 mai 2018 annula le jugement dont appel et statuant à nouveau condamna la wilaya de Constantine à payer le montant de la prestation fournie par la société cocontractante tel que mentionné dans sa facture. Le Conseil d’Etat a annulé le jugement du tribunal administratif et rejeta le moyen tiré de la prescription de la créance due à la société appelante au motif que , si l'article 16 de la loi n° 84-17 prévoit effectivement que les créances dues par les institutions publiques se prescrivent par l’expiration du délai de 4 ans , par contre l’article 17 de la même loi dispose que : « les dispositions de l’article 16 ne s'appliquent pas aux créances dont l’ordonnancement et le paiement n’auraient pu être effectués dans les délais visés audit article par le fait de l’administration »
Dans l'affaire objet de l’arrêt du 04 mai 2018 , le Conseil d'État a pris acte et constaté que la wilaya de Constantine a exprimé sa volonté explicite de ne pas payer le montant de la facture présentée par la société cocontractante, et que par conséquent il n'y a pas lieu à l’application de l'article 16 de la loi n° 84-17 qui prévoit la prescription . En ce qui concerne le bien de la demande de paiement de la créance quant au fond , le Conseil d'Etat a appliqué son ancienne jurisprudence selon laquelle les créances du cocontractant deviennent exigibles si ce dernier produit le procès -verbal de livraison de la marchandise ou de la prestation sans que le service contractant n’émette aucune réserve, accompagné de la facture ou de la situation visée par le service contractant . Dans son arrêt du 04 mai 2018 , le Conseil d'État a constaté que la wilaya de Constantine a bien reçu la marchandise en vertu d’un procès-verbal de réception portant son visa et dépourvu de réserve lors de la livraison, et en conséquence le Conseil d’Etat a jugé que l’action engagée par la société cocontractante tendant à voir condamner la wilaya de Constantine à lui payer le montant de sa facture est fondée dans la forme et dans le fond.
2-2- Résiliation d’un marché public
Le Conseil d'État a précisé et détaillé sa jurisprudence en matière de résiliation des marchés publics par le service contractant et les effets de cette résiliation. Pour diverses raisons, le service contractant peut décider de résilier le marché public conclu avec le partenaire cocontractant qui décide alors de saisir le tribunal administratif d'une action tendant à l'annulation de la décision de résiliation avec indemnisation du préjudice. Certaines juridictions administratives ont donné une suite favorable à de telles actions.
Dans un arrêt 07 février 2019 , dossier n° 137243, le Conseil d'État a remis en cause les décisions de certains tribunaux administratifs qui ont jugée comme fondées des actions tendant à l’annulation pour excès de pouvoir des décisions de résiliation de marchés publics rendues par le service contractant et ce au motif que la résiliation d’un marché public est un privilège accordé à l'administration qui n’est pas susceptible d’annulation . Cette jurisprudence du Conseil d’Etat , qui reproche aux juridictions administratives inferieures d’avoir jugé comme illégales les décisions du service contractant de résilier un marché public , est conforme à la loi relative aux marchés publics en vigueur à la date où a été rendu son arrêt à savoir le décret présidentiel n° 02-250 du 24 juillet 2002 en ses articles 99 et 100 identiquement transposés dans l’actuelle code des marchés publics à l’ articles 149 et suivants du décret présidentiel n° 15-247 du 16 septembre 2015 portant réglementation des marchés publics et des délégations de service public .
Dans le cas où le service contractant décide de résilier unilatéralement le marché public conclu avec un partenaire cocontractant, si ce dernier n’a pas le droit de demander l’annulation de la décision de résiliation , par contre il est de son droit d'exiger une indemnisation pour les travaux réalisés et la contrepartie des marchandises et équipements laissés sur le chantier .C’est ce qui a été jugé par le Conseil d'État dans un arrêt daté du 2 mai 2019, dossier n° 137510. Dans cet arrêt le Conseil d'État a consacré un autre principe consacré dans d’autres décisions antérieures selon lequel si le décompte général définitif ( le DGD) a été établi en accord et avec la signature du partenaire cocontractant , celui-ci sera tenu par le contenu de ce DGD quant à la quantité et à la valeur des travaux réalisés , et par conséquent il ne pourra pas réclamer devant la juridiction administrative la valeur des travaux réalisés qui dépasse la valeur spécifiée dans ce DGD. Dans un ancien arrêt daté du 15 avril 2003 dossier n° 8072 , le Conseil d’Etat a jugé que le DGD constitue le décompte final qui précise et le montant définitif du marché public et l’ensemble des travaux réalisés ou les changements intervenus sur les travaux .En outre le DGD valide et certifie l’acompte restant dû au cocontractant, et que dès lors ce DGD devient après sa signature un acte exécutoire définitif qui met fin à toutes les contestations de sorte que toutes les réclamations ultérieures deviennent irrecevables.
Si le service contractant décide de résilier le marché public pour quelque raison que ce soit , ce dernier doit établir un procès-verbal des travaux réalisés et déterminer leur valeur , et ce en présence du partenaire cocontractant ou après l’avoir dûment convoqué, et s’il ne se présente pas, il ya lieu dans cette situation à l’établissement de ce procès-verbal en présence d'un témoin désigné par le service contractant et ce conformément aux dispositions de l'article 43 du cahier des clauses administratives générales .Ces règles ont été consacrées par le Conseil d'État dans un arrêt du 9 juillet 2020, dossier n° 154123.
Selon la jurisprudence établie par le Conseil d'État dans sa décision du 9 juillet 2020, si le service contractant décide de résilier un marché public sans établir un procès verbal des travaux réalisés par le cocontractant précisant leur valeur, ou si ce procès verbal est établi sans convocation dûment justifiée du cocontractant ,ou encore si ce procès-verbal est établi en l'absence du cocontractant dûment convoqué mais sans la présence d'un témoin, le procès- verbal fixant les travaux réalisés et leur valeur sera entaché de nullité et par conséquent il doit être rejeté.
Dans l’affaire objet de l’arrêt du Conseil d'Etat du 9 juillet 2020 ,l’office de promotion et de gestion immobilière de la wilaya de Batna a conclu un marché public avec une société de construction pour la réalisation d’un ensemble de logements sociaux dans un délai de 14 mois. Suite au retard dans l’exécution de ce projet par la société contractante malgré la mise en demeure qui lui a été signifiée, le service contractant décida de résilier le marché public et établit un DGD déterminant la valeur des travaux réalisés et des travaux réalisés non payés ainsi que le montant de la retenue de garantie et la pénalité de retard. Le service contractant en l’occurrence l'office de promotion et de gestion immobilière assigna la société cocontractante devant le tribunal administratif de Batna à l’effet de voir cette dernière condamner à lui payer les indemnités dues .Statuant sur cette demande , le tribunal Administratif de Batna a rendu un jugement rejetant ladite demande comme non fondé et suite à l’appel introduit par le service contractant ,le Conseil d’Etat a rendu l’arrêt du 9 juillet 2020 qui confirma le jugement du tribunal administratif de Batna pour les motifs sus-exposés, notamment au motif que le DGD n’a pas été établi contradictoirement en présence du partenaire cocontractant.
L’arrêt du Conseil d'État du 9 juillet 2020 a établi un autre principe selon lequel si le service contractant est en droit d'imposer au cocontractant des pénalités en cas de non-exécution de ses obligations contractuelles dans les délais prescrits (pénalités de retard) et ce conformément à l'article 147 du décret présidentiel n°15-247,ces pénalités financières ne sont calculées et dues que dans le cas où le projet objet du marché public a été réalisé hors des délais convenus , aussi ces pénalités ne peuvent-être appliquées dans le cas où le marché public a été résilié avant son exécution totale , car dans ce cas doivent être appliqués les effets dus à la résiliation et non pas les effets dus à la réalisation du projet hors délais convenus.
Maitre BRAHIMI Mohamed
Avocat à la cour de Bouira
brahimimohamed54@gmail.com