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Les arrêts les plus marquants rendus par la Cour suprême et publiés dans ses deux dernières revues (année 2019 n° 1 et 2) 2e PARTIE

mohamed brahimi Par Le 29/05/2021

 

Image cour supreme

1 -ARRETS DE LA CHAMBRE FONCIERE

♦ Fixation des loyers dans le secteur privé

Dans un arrêt  du 17/01/2019 dossier numéro 1178368  , la chambre foncière de la Cour suprême  a jugé que la détermination  du prix du loyer des biens immobiliers  du secteur privé est soumise aux prix du marché en fonction de l’offre et de la demande et  que les loyers appliqués aux logements cédés par les offices de promotion et de gestion immobilière ne sont pas applicables en la matière. 

Cet arrêt ne deroge pas à la jurisprudence traditionnelle de la Cour suprême mais elle laisse telle quelle la problématique du vide juridique en matière d'encadrement des loyers et leur plafonnement notamment dans les zones tendues où les loyers atteignent des sommets.

Achats de droits litigieux

L’article 402 du code civil dispose que  : «  Les magistrats, avocats, défenseurs de justice, notaires ,secrétaires-greffiers , ne peuvent acheter, ni par eux-mêmes ni par personne interposée, en tout ou en partie, des droits litigieux qui sont de la compétence des juridictions dans le ressort desquelles ils exercent leurs fonctions, et ce à peine de nullité de la vente ».Quant à l’article 403 du même code  il  dispose que : « Les avocats et défenseurs de justice ne peuvent, ni par eux-mêmes ni par personne interposée faire avec leurs clients aucun acte relatif aux droits litigieux lorsqu’ils ont assumé la défense de ces droits et ce, à peine de nullité du pacte » .

Interprétant cette  disposition, la Cour suprême a jugé dans un arrêt du 14/03/2019 dossier numéro 1252446 que : « Un droit litigieux n’est considéré  comme tel pour l’application de l’article 402 du code civil que s’il acquiert  ce caractère  litigieux  au moment où l’acheteur  en a eu  connaissance ; En conséquence si le litige intervient après l’achat ou le règlement du litige , le droit n’est pas considéré comme litigieux ». 

Responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle en matière de négociations de contrats

Dans un arrêt du 14/03/2019 dossier numéro 1167075, la Cour suprême a jugé  que la rupture unilatérale des  négociations préalables  à la signataire d’un contrat de vente ou d’échange d’un  bien immeuble n’entraine aucune   responsabilité  contractuelle s’agissant d’actes matériels et non juridiques ,mais que néanmoins cette rupture unilatérale peut être constitutive d’une responsabilité délictuelle en cas de faute émanant de la partie ayant  refusé de conclure l’acte définitif.

Dans le cas d’espèce , des négociations entre une agence de gestion et de régulation foncière urbaine de wilaya et une personne privée ont abouti à un accord en vertu duquel sera effectué un échange entre deux terrains appartenant aux parties mais pour des motifs propre à l’agence, cette dernière refuse de se présenter  devant notaire pour les formalités de transfert de propriété et de publication .Assignée devant le tribunal à l’effet de se voir condamner à  concrétiser l’échange par devant notaire , le tribunal puis la cour d'appel et enfin la Cour  suprême ont  statué en faveur de l'agence aux motifs mentionnés dans l’arrêt du 14/03/2019 suscité .Il reste à la personne lésée par le comportement de l’agence à assigner cette dernière en dommages et intérêts sur le terrain de la responsabilité délictuelle.

la possession  et  la prescription acquisitive

En application de l’article 827 du code civil : « Celui qui exerce la possession sur une chose mobilière ou immobilière ou sur un droit réel mobilier ou immobilier sans qu’il en soit propriétaire ou le titulaire, en devient propriétaire si sa possession continue sans interruption pendant quinze ans » . Quant aux servitudes ( par exemple  le droit de passage sur un terrain appartenant à autrui) elles ne peuvent être acquises par prescription que si elles sont apparentes et ce conformément à l’article 868 du même code ;

En application de ce texte ,tout détenteur d’un bien immeuble peut en revendiquer la possession sous certaines conditions. Cette possession peut être convertie en usucapion ( prescription  acquisitive ) si la possession a durée plus de 15 ans .Mais par exception à cette règle ,certains  immeubles ou droits immobiliers ne peuvent être appropriés par la possession. Ainsi la Cour suprême a jugé dans un arrêt du 14/02/2019 dossier numéro 1306047 que les espaces verts situés dans les ensembles d'immeubles d’habitation  appartiennent au domaine public communal et constituent des parties communes et par conséquent ils ne peuvent être revendiqués par un tiers en excipant de la possession ou de la prescription acquisitive .

En matière de prescription acquisitive il est une question d’importance , c’est celle de  la preuve de l’accomplissement de la durée de 15 ans .La règle est que la preuve peut être apportée par tous moyens notamment par les témoignages. Le possesseur d’un bien immeuble ou d’un droit immobilier peut exciper d’un acte même sous seing privé ( un acte signé par les seules parties sans intervention d'un notaire ) mentionnant la possession. Dans un arrêt du 12/09/2019 dossier numéro 1202678 ,la Cour suprême a jugé qu’un acte sous seing privé portant reconnaissance d’un droit de passage sur un terrain  peut être pris en compte dans le calcul de la durée de la prescription acquisitive.

Dans le même sens, la Cour suprême a jugé dans un arrêt rendu le même  jour dossier numéro 1205921 que : «  La possession d’un acte sous seing privé portant cession d’un terrain constitue une présomption légale de possession  et la cour d’appel qui a reconnu force probante à cet acte quant à la preuve de la possession a fait une juste application de la loi ».

La force probante du procès-verbal de conciliation en cours d’instance

Quand les parties dans une instance pendante devant le juge décident de se concilier avant que ce dernier ne statue sur le litige , cette conciliation sera constatée par le tribunal qui établira un procès-verbal de conciliation. Ce procès-verbal  qui est  signé par les parties , le juge et le greffier constitue en vertu de l’article 993 du code de procédure civile et administrative un titre exécutoire , c’est à dire qu’il a la même valeur et le même rang qu’un jugement  .Mais ce procès-verbal à supposer qu’il concerne un accord portant sur la propriété immobilière transfert-il la propriété dès sa signature ?C’est à cette question qu’a répondue la Cour suprême  dans un arrêt en date du 12/09/2019 dossier numéro 1211122.La Haute cour a jugé qu’en l’absence de la publication à la conservation foncière du  procès-verbal de conciliation , il ne peut y avoir  de transfert de propriété .En outre elle a jugé que le détenteur d’un tel procès-verbal de conciliation ne peut saisir le juge à l’effet de rendre un jugement obligeant la partie adverse partie à ce procès-verbal  à  procéder  à cette publication ,cette formalité incombant à la partie mentionnée au  procès-verbal qui y a intérêt.

 

Maitre Mohamed BRAHIMI

Avocat à la cour de Bouira

brahimimohamed54@gmail.com