Le retard dans l’établissement du cadastre général a créé une situation où le système prévalant en Algérie est un système hybride puisque dans les régions non cadastrées, c’est l’ancien système de publicité personnelle qui régit encore les transactions immobilière.
1- Le système du livre foncier
C’est l’ordonnance n° 75-74 du 12 /11/ 1975 qui a institué le livre foncier.Mais bien avant cette date les pouvoirs publics avaient déjà anticipé sur le choix de ce système puisque l’ordonnance n° 71-73 du 08/11/1971 portant révolution agraire disposait déjà dans son article 25 qu’à l’achèvement des opérations entreprises au titre de la révolution agraire dans une commune donnée, il est procédé à partir du fichier immobilier à l’établissement des documents cadastraux de cette commune et que le cadastre général du pays est élaboré dans des conditions et suivant des modalités qui seront fixées ultérieurement . En outre le décret n° 73-32 du 05/01/1973 relatif à la constatation du droit de propriété privée énonçait dans son article 32 que : « Dès l’institution de cadastre général, les certificats de propriété seront remplacés par des livrets fonciers » .
Le livre foncier établit la situation juridique des immeubles et indique la circulation des droits immobiliers. Il es tenu pour chaque commine au niveau de la conservation foncière compétente sous la forme d’un fichier immobilier.S’agissant de la création d’un nouveau système qui doit remplacé l’ancien système en vigueur ,le livre foncier est constitué au fur et à mesure de l’établissement du cadastre sur le territoire de la commune concernée. La cadastration des communes doit donc précéder la constitution du livre foncier.
Le fichier immobilier qui forme le livre foncier est institué conformément à une procédure spécifique fixée par les dispositions de l’ordonnance n° 75-74 suscitée .Les textes d’application de cette ordonnance sont le décret n° 76-62 du 25/03/1976 relatif à l’établissement du cadastre général modifié et complété par le décret n° 84-400 du 24/12/1984 et le décret exécutif n° 92-134 du 07/04/1992 et le décret n° 76-63 du 25/03/1976 relatif à l’institution du livre foncier modifié et complété par le décret n° 80-210 du 13/09/1980 et le décret exécutif n°93-123 du 19/05/1983. Cette procédure commence par des actes matériels de constitution du cadastre c’est à dire la délimitation des propriétés qui sera la base matérielle du livre foncier , et se termine par des actes juridiques de dépôt des documents cadastraux , de l’immatriculation des immeubles cadastrés et la création des fiches immobilières et enfin l’établissement du livret foncier qui sera délivré au propriétaire.
1-1- La procédure relative à la première formalité de publication des droits de propriété et des autres droits réels au livre foncier
Ayant fait le choix du système de publicité réelle et du livre foncier , le législateur algérien se devait de fixer les procédures d’immatriculation des droits réels au livre foncier.La première étape consiste dans le dépôt des documents de cadastre à la conservation foncière qui établit un procès-verbal de remise.Les documents de cadastre comprennent par commune , outre un état de section et d’un registre parcellaire sur lesquels les divers immeubles sont rangés dans l’ordre topographique , une matrice cadastrale sur laquelle les immeubles réunis par propriétaires ou exploitants sont inscrits dans l’ordre alphabétique de ces derniers et les plans cadastraux conformes à la situation parcellaire actuelle.
Une fois les documents de cadastre déposés à la conservation foncière ,tout propriétaire est tenu de déposer auprès de la conservation foncière du lieu de situation de son immeuble un bordereau rédigé par un notaire, un secrétaire des actes administratifs ou un, secrétaire-greffier. Ce bordereau comprend la description des immeubles par référence au plan cadastral, l’identité et la capacité du titulaire des droits, les charges grevant les immeubles et doit être accompagné des titres de propriété(art .10 du décret n°76-63 ). A l’issue de ces formalités, et en l’absence de toute contestation, les mentions de la demande d’inscription serviront de base à l’inscription et il est procéder à la publication .Il est remis un livret foncier au propriétaire
Il est remis au propriétaire foncier un livret foncier à l’occasion de la première formalité, reproduisant les annotations du fichier immobilier (art. 18 de l'ordonnance n° 75-74). Le livret foncier forme le titre de propriété (art. 19 de l’ordonnance n° 75-74). Le livret foncier qui vaut titre de propriété est nécessaire pour l’accomplissement de toute publicité foncière, sauf en cas de décision judiciaire ou d’hypothèque légale. Livre foncier et livret fonciers doivent donc être concordants. L’inscription au livre foncier doit précéder toute modification cadastrale et ce conformément à l’article 72 du décret 76-63 qui énonce : « Aucune modification de la situation juridique d’un immeuble ne peut faire l’objet d’une mutation cadastrale si l’acte ou la décision judicaire constatant cette modification n’a pas été préalablement publié au fichier immobilier ».
La formalité de dépôt d’un bordereau pour l’obtention du livret foncier prévue par l’article 10 du décret n°76-63 a été supprimée par l’article 66 de la loi de finances pour l’année 2015.Dorénavant la délivrance du livret foncier ne nécessite que la présentation de la copie de l’acte de propriété ou tout document justifiant la possession ainsi que l’extrait de l’état de section ( le CC12).
1-2 - Le livret foncier
Le livret foncier est donc le dernier acte sanctionnant la procédure de constitution du fichier immobilier. Il est remis au propriétaire dont le droit est actuel , à l’occasion de la création de la fiche d’immeuble correspondante. Mais s’il s’agit d’une transmission d’un droit de propriété ( par exemple la vente de l’immeuble) par un propriétaire titulaire du livret foncier donc qui ne nécessite pas la création d’une nouvelle fiche, ce transfert de propriété donnera lieu seulement à la mise à jour de ce livret qui sera déposé par l’ancien propriétaire à la conservation foncière et remis au nouveau propriétaire ( art.46 du décret n° 76-63).
Le livret foncier doit être conforme à un modèle fixé par l’arrêté du 27 mai 1976 du ministre des finances. Il est établi ou annoté de façon nette et lisible, à l’encre noire indélébile , les blancs sont bâtonnés et les rôles cotés et paraphés .Les noms patronymiques des parties sont inscrits en lettres majuscules d’imprimerie, les prénoms en lettres minuscules. Les surcharges et grattages sont interdits et les erreurs ou omissions sont rectifiées par des renvois .Les mots et les chiffres rayés ainsi que les renvois sont numérotés, inscrits à la suite de l’annotation qu’ils concernent et approuvés par le conservateur. Un tarit à l’encre est tiré après chaque formalité. Le conservateur précise la date de la délivrance du livret foncier et le texte en vertu duquel cette dernière a été effectuée. Il certifie l’exactitude de chaque mention ou annotation en apposant, à la suite, sa signature et le timbre de la conservation.
Lorsque deux ou plus de deux personnes sont titulaires de droits indivis, un seul livret est établi et reste en dépôt à la conservation foncière , à moins que, dans un document publié, ces personnes ne désignent, parmi les propriétaires un mandataire pour le détenir. Mention de la destination donnée au livret est portée sur la fiche correspondante. Il peut arriver que le livret foncier soit perdu ou détruit et dans ce cas le propriétaire peut sur demande écrite et motivée et sur justification de son identité obtenir la délivrance d’un autre livret (art 52 du décret n° 76-63).
Aucune formalité ne peut être accomplie lorsque les documents déposés ne sont pas accompagnés du livret foncier. Toutefois, le conservateur procède à la publication sans exiger la représentation du livret foncier lorsqu’il s’agit de l’un des actes déposés lors de la constitution du fichier immobilier ou d’un acte dressé ou d’une décision judiciaire rendue sans le concours ou à l’encontre du propriétaire ou encore lorsqu’il s’agit de l’inscription d’un privilège ou d’une hypothèque légale ou judiciaire.
Dans les zones cadastrées dont les droits réels ont été publiés au livre foncier , seul le livret foncier forme titre de propriété .De cette règle découle plusieurs conséquences. D’abord en l’absence du livret foncier aucun transfert de propriété ( vente ,donation…)ne peut intervenir. En cas de litige judicaire tendant à faire prononcer la résolution, la révocation, l’annulation ou la rescision de droits résultants de documents publiés donc une action tendant à la modification de la situation juridique d’un immeuble inscrit au fichier immobilier, l’action en justice n’est recevable que si la citation devant la juridiction a été publiée à la conservation foncière ( art 85 du décret n° 76-63).Cette publication de la citation devant la juridiction sera justifié la remise à la juridiction d’une deuxième copie de la citation revêtue de la mention de publivité.En outre s’il s’agit d’une action en partage judiciaire d’un immeuble en indivision inscrit au fichier immobilier , l’action devant le tribunal ne sera recevable que si une copie du livret foncier est produite. Enfin,toute action en annulation ou en modification du livret foncier doit être portée devant le tribunal administratif et non pas devant la section foncière du tribunal.
1-3- Le certificat d’immatriculation foncière provisoire
Au cas où des oppositions ou des contestations sont élevées au cours des opérations d’établissement du cadastre ou après le dépôt des documents du cadastre, l’immatriculation de l’immeuble ou du droit réel sera une immatriculation provisoire. Il ne sera par remis de livret foncier au propriétaire mais il est délivré à ce dernier un certificat d’immatriculation foncière provisoire.Ce certificat d’immatriculation provisoire , et conformément à l’article 352-2 de l’ordonnance n° 76-105 du 09/12/1976 complétée et modifiée portant code de l’enregistrement , emporte les mêmes effets juridiques que ceux prévus en matière de certificat de possession institué par les dispositions des articles 42 à 46 de la loi n° 90-25 du 18/11/1990 portant orientation foncière. En conséquence, le détenteur d’un certificat d’immatriculation foncière provisoire agit en véritable et unique propriétaire exception faite du transfert à titre gratuit ou onéreux .Le détenteur d’un certificat d’immatriculation foncière provisoire ne peut donc ni vendre ni donner ni léguer l’immeuble et c’est là la différence essentielle avec le livret foncier car seul ce dernier permet au propriétaire d’aliéner son bien.
2 - Le contentieux de l’immatriculation
Nous aborderons successivement le contentieux en rapport avec la procédure d’établissement du cadastre , le contentieux relatif à l’immatriculation provisoire, le contentieux relatif à l’immatriculation définitive et enfin les litige tendant à l’annulation ou à la modification du livret foncier lui-même.
2-1- Le contentieux de la cadastration
Bien que la loi portant établissement du cadastre général et institution du livre foncier a été promulgué en 1975 , force est de constater que les opérations de cadastre ont pris un retard considérable et que seule une partie du territoire national qui ne dépasse pas les 30 ℅ est à ce jour cadastrée. Ces opérations de cadastre sont donc appelées à se poursuivre ce qui induit la persistance du contentieux de la cadastration . L’étude de ce contentieux n’est donc pas inutile.
La confection du cadastre comme déjà mentionné consiste en l’établissement dans chaque commune :
a - d’un état de section et d’un registre parcellaire sur lesquels les divers immeubles sont rangés dans l’ordre topographique ;
b- d’une matrice cadastrale sur laquelle les immeubles réunis par propriétaires ou exploitants, sont inscrits dans l’ordre alphabétique de ces derniers ;
c - de plans cadastraux conformes à la situation parcellaire actuelle.
C’est le wali qui indique dans un arrêté et pour chaque commune la date d’ouverture des opérations de cadastration.Dès l’ouverture des opérations , une commission cadastrale est créée dans chaque commune.Cette commission est présidée par un magistrat du tribunal désigné par le président de la cour. C’est cette commission qui supervise ces operations.Une fois les travaux techniques , le plan cadastral et les documents annexes sont déposés au siège de la commune , toute personne a le droit d’en prendre connaissance et le cas échéant présenter une réclamations et ce dans le délai d’un mois à compter de ce dépôt.
Les réclamations qui sont produites à ce niveau soit par les propriétaires ou les tiers sont soumises à l’examen de la commission cadastrale susmentionnée qui donne son avis sur ces réclamations ,essaie de concilier les intereressés et, à défaut de conciliation ,fixe les limites provisoires des immeubles telles qu’elles doivent être figurées ,en tenant compte de la possession (art. 12 du décret n° 76-62).
Si la commission arrive à concilier les parties en litige, les documents cadastraux en rapport avec l’immeuble en litige sont réputés conformes à la situation actuelle de cette propriété. Si par contre le litige persiste et que la commission échoue à concilier les parties , elle procède à la fixation des limites provisoires telles qu’elles doivent figurer au plan de l’immeuble et donne un délai de 3 mois aux propriétaires pour s’accorder sur leurs limites ou pour introduire en action en justice (art. 14 du décret n° 76-62).
Le recours à la justice au niveau de l’opération d’établissement du cadastre intervient donc quand les parties ne s’entendent pas sur les limites de leurs propriétés respectives et n’arrivent pas à s’entendre devant la commission cadastrale .Il revient alors au propriétaire qui a intérêt en l’occurrence le propriétaire qui se considérer lésé par la délimitation opérée à saisir la juridiction pour faire valoir son droit sur la partie de l’immeuble litigieux.Le non respect du délai de 3mois fixé par l’article 14 du décret n° 76-62 pour saisir la juridiction n’a pas pour effet de rendre cette action irrecevable mais elle aura pour seule effet comme nous l’avons mentionné de rendre définitives les limites de l’immeuble litigieux , et ces limites définitives seront par conséquent considéré comme telles par le conservateur foncier lors de l’immatriculation de cet immeuble. Le propriétaire lésé aura toujours la faculté de remettre en cause les limites fixées lors des opérations cadastrales quant bien même le délai de 3 mois est expiré mais dans ce cas la réclamation portera sur la propriété du droit réel contesté et sera dirigée contre la formalité de l’immatriculation au livre foncier opérée par le conservateur foncier . Il s’agira alors d’un contentieux de l’immatriculation foncière qui est régi par des dispositions particulière et relève d’une procédure spécifique.
La différence entre intenter une action devant la juridiction lors du dépôt du plan cadastral au siège de la commune et l’intenter lors de la procédure de l’immatriculation foncière opérée par le conservateur foncier est que cette dernière action notamment l’action en modification ou en annulation de l’immatriculation définitive relève comme nous le verrons du tribunal administratif qui est beaucoup plus réticent que le tribunal civil à modifier ou à annuler une décision du conservateur foncier qui somme toute n’ a été prise qu’après une enquête foncière approfondie et un examen minutieux des documents fournis.En outre , s’agissant beaucoup plus d’un litige foncier que d’un litige administrait , très souvent les justiciables ont recours à des manœuvres dilatoires pour faire obstacle au jugement de l’action pendante devant le tribunal administratif en excipant d’une question préjudicielle de propriété immobilière.
En tout état de cause si le propriétaire réclamant décide de saisir la juridiction lors du dépôt du plan cadastral , cette action est portée devant la section foncière du tribunal du lieu de la situation de l’immeuble litigieux. Il s’agira donc d’une action immobiliere.Les parties à l’instance sont d’une part le propriétaire lésé en tant que demandeur et d’autre part le propriétaire dont l’immeuble a fait l’objet de la délimitation litigieuse en tant que défendeur S’agissant d’un immeuble qui n’est pas encore inscrit au livre foncier ,il n’y a pas lieur de publier la requête introductive d’instance.Les parties doivent produire devant le juge leurs actes de propriété respectifs et s’il s’agit d’une propriété acquise par prescription acquisitive , produire toute preuve susceptible de conforter la possession de plus de 15 ans. C’est au vu de ces documents et des éléments invoqués que le juge prendra sa décison.Au vu de la nature du litige,le juge désignera un expert ou ordonnera une enquête pour déterminer le propriétaire de l’immeuble ou de la partie de l’immeuble litigieux et c’est sur la base des résultats de cette expertise ou de cette enquête que le jugement sera rendu.
Le demandeur sera soit débouté de son action au motif qu’il n’a pas prouvé que le droit litigieux qu’il revendique lui appartient , soit il est fait droit à sa demande et fera condamner le defendeur.L’un et l’autre des belligérants devra ensuite suivant le dispositif du jugement rendu faire valoir ses droits. En conformité avec le jugement rendu, les limites déterminées provisoirement deviendront soit définitives soit modifiées .Il appartient à la partie qui a intérêt à saisir la conservation foncière et lui remettre le jugement rendu .Ce jugement doit être un jugement définitif c'est-à-dire non susceptible d’appel ou d'opposition et revêtu de la formule exécutoire. S’agissant d’un litige en rapport aces les opérations l’établissement du livre foncier , rien n’empêche le service chargé du cadastre d’exiger que le jugement soit irrévocable c'est-à-dire non susceptible d’aucune voie de recours y compris d’un recours extraordinaire
2-1-2 - Le contentieux de l’immatriculation provisoire
2-1-2-1- L’immatriculation provisoire de 5 ans
Lorsque les documents de cadastre sont déposés à la conservation foncière et le procès-verbal de remise dressé par le conservateur foncier, il es procédé à une large publicité de ce dépôt et ce pour permettre aux propriétaires de se faire délivrer par le conservateur foncier tous documents attestant leurs droits sur les immeubles cadastrés.La période à respecter entre la date du dépôt des documents du cadastre et celle de l’opération de délivrance des documents attestant la propriété est de 4 mois (art. 9 du décret n° 76-63).A l’issue de la période de 4 mois et pour se faire délivrer ces documents , le propriétaire doit déposer un dossier comprenant un bordereau fourni par la conservation foncière contenant certains renseignements ainsi que la description de l’immeuble accompagné le cas échéant des titres de propriété.
Si à l’issue de la période de 4 mois les propriétaires concernés ne déposent pas le bordereau et lorsque le conservateur foncier n’est pas en mesure de se prononcer utilement sur la détermination des droits de propriété des intéressés en raison, notamment de l’absence ou de l’insuffisance de titres justificatifs , l’immatriculation qui sera opéré par le conservateur foncier sur le livre foncier sur la seule base des éléments contenus dans les documents du cadastre ne sera pas définitive mais provisoire. Cette immatriculation gardera cette nature provisoire pendant une période de 5 ans qui commence à courir à compter de la date du procès-verbal de remise des documents du cadastre à la conservation foncière .A l’issue de cette période de 5 ans l’immatriculation au livre foncier deviendra définitive. Mais si des faits juridiques sont portés entre-temps à la connaissance du conservateur foncier par toute personne , et si ces faits permettent à ce dernier d’établir d’une manière certaine les droits réels à publier au livre foncier, rien n’empêche le conservateur foncier de procéder à la modification ou à l’annulation de l’immatriculation et procéder à une nouvelle immatriculation en conformité avec ces nouveaux faits juridiques (art. 18 du décret n° 76-63).
Toute personne intéressée pourra durant toute la période où l’immatriculation est réputée provisoire saisir la juridiction compétente à l’effet de demander l’annulation ou la modification de cette immatriculation si cette personne est fondée à revendiquer l’immeuble ou le droit réel en rapport avec cette immatriculation. Mais avant de saisir la juridiction , la loi a prévu une procédure de conciliation préalable à cette saisine .Tout d’abord, la personne qui conteste l’immatriculation provisoire d’un immeuble doit notifier cette contestation par lettre recommandée tant au conservateur foncier qu’à la partie adverse comme elle peut consigner cette contestation sur un registre ouvert à cet effet auprès de chaque conservation foncière. Suite à cette contestation élevée, le conservateur foncier a pouvoir de concilier les parties et de dresser un procès-verbal de conciliation. Si les parties se concilient, le conservateur foncier établira un procès-verbal de conciliation qui aura force d’obligation privée ( article 15-2 du décret n° 76-63).Mais au cas où la tentative de conciliation entre les parties demeure infructueuse, le conservateur foncier établit un procès-verbal de non-conciliation qu’il notifie aux parties et à compter de cette notification la partie demanderesse dispose d’un délai de 6 mois pour portet sa contestation devant la juridiction et ce sous peine d’irrecevabilité de son action ( article 15-5 du décret n° 76-63).
S’il s’agit d’une immatriculation provisoire entre personnes de droit privé , la juridiction compétent pour statuer sur toute opposition à cette immatriculation est la section foncière du tribunal et ce conformément à l’article 516 du Code de procédure civile et administrative . La jurisprudence tant de la Cour suprême que du Conseil d’Etat est constante sur la compétence de la section foncière si le litige concerne l’opposition à l’immatriculation provisoire entre personnes de droit privé (Cour suprême,25/02/2004,dossier n° 246259,revue de la Cour suprême,année 2007,N°1,p.383 ; Cour suprême,12/04/2012, revue de la Cour suprême,année 2012,n°2,p. 390 ;Conseil d’Etat , 29/10/2009,arrêt n° 49444,revue du Conseil d’Etat,2012 ,p.146).Par contre si l’une des parties à une telle action est une personne morale de droit public ( Etat,wilaya,commune, établissement public à caractère administratif ) , c’est le tribunal administratif qui sera compétent pour statuer ( Tribunal des conflits, 16/05/2011,arrêt n° 102, revue du Conseil d’Etat, 2012 ,p. 177 ).
Le juge statuera sur l’opposition à l’immatriculation de l’immeuble litigieux au regard de la légalité et de la pertinence des titres et documents excipés par les parties, et le cas échéant appliquer les dispositions de l’article 818 du code civil en vertu desquelles : « Est meilleure la possession fondée sur un titre légitime , et si aucun des deux parties n’a de titre ou s’ils ont des titres d’égale valeur ,la meilleur possession est la plus ancienne en date » ( arrêt de la Cour suprême du 25/02/2004 susvisé)
2-1-2-2 - L’immatriculation provisoire de 2 ans
L’immatriculation d’un immeuble restera provisoire et n’acquerra le caractère d’une immatriculation définitive qu’après un délai de 2 ans à compter du jour ou elle a été opérée si l’immeuble ne dispose pas de titres justificatifs suffisants et lorsque le conservateur foncier n’est pas en mesure de se prononcer utilement sur la détermination des droits du propriétaire apparent (art. 14 du décret n° 76-63). Cette immatriculation provisoire peut être entre temps annulée ou modifiée par le conservateur foncier s’il est porté à la connaissance de ce dernier des faits juridiques qui lui permettent d’établir d’une manière certaine les droits réels à publier au livre foncier.
La procédure devant la juridiction en cas d’opposition à cette immatriculation provisoire de 2 ans est régis par les même règles sus- mentionnés applicable à l’oppossion à l’immatriculation provisoire de 5 ans.
2-1-2-3 - L’immatriculation provisoire de 4 mois
La période durant laquelle l’immatriculation demeure provisoire est seulement de 4 mois pour les immeubles dont les propriétaires apparents sont dépourvus de titres légaux de propriété,mais qui exercent selon les indications portées dans les documents cadastraux une possession dont la durée leur permet d’exciper de la prescription acquisitive. A l’issue de cette période de 4 mois l’immatriculation devient définitive mais à la condition qu’aucune opposition affectant le droit de propriété n’ait été signifiée au conservateur foncier ,ou que les oppositions qui se sont produites ont été retirées ou rejetées.
L’opposition à cette immatriculation provisoire de 4 mois est régie par les mêmes règles sus- mentionnés .
2-1-3 - Le contentieux du livret foncier ou de l’immatriculation définitive
A l’expiration des différentes périodes fixées pour l’immatriculation provisoire au livre foncier, l’immatriculation devient définitive. Le livret foncier est alors délivré au propriétaire. Conformément à l’article 19 de l’ordonnance n° 75-74 et à l’article 19 de décret n° 73-32 du 05/01/1973 relatif à la constatation du droit de propriété privée , le livret foncier forme titre de propriété (,Cour suprême,28/06/2000,dossier n°197920,revue judicaire ,année 2001,n°1,p.249 ;Cour suprême,21/04/2004,dossier n° 259635revue de la Cour suprême,année 2010,n°3, p.257 )
Etant un titre de propriété, le livret foncier peut être attaqué en justice à l’effet de le faire annuler ou modifier .Comme toute action en justice, cette action doit être engagée avant le délai de son extinction faute d’agir c'est-à-dire avant le délai de 15 ans à compter de la date de l’établissement de livret foncier. Le livret foncier n’étant que la reproduction des annotations du fichier immobilier où la formalité de l’immatriculation définitive est mentionnée, l’action peut être dirigée indifféremment contre le livret foncier lui-même ou contre la formalité de l’immatriculation définitive de l’immeuble litigieux. Le Tribunal des conflits a ainsi jugé que l’action en annulation du livret foncier doit être considérée comme une action en annulation de l’immatriculation définitive au livre foncier ( 15/10/2012,arrêt n° 133,revue de la Cour suprême,année 2013 ,n°2,p.463).
Si la juridiction compétente en matière d’opposition à l’immatriculation provisoire entre personnes de droit privé est la section foncière du tribunal , c’est le tribunal administratif qui est compétent pour les oppositions à l’immatriculation définitive ou tendant à l’annulation ou à la modification du livret foncier .C’est là une règle constante confortée par la jurisprudence des deux plus hautes juridictions nationales .Le tribunal administratif statuera sur le bien fondé de la demande d’annulation ou de modification du livret foncier ou de l’immatriculation définitive au vu des titres et arguments présentés par les parties. Le jugement rendu par le tribunal administratif , au cas où il fait droit à la demande d’annulation ou de modification , pourra enjoindre au conservateur foncier de procéder à la formalité visée dans le dispositif de ce jugement.