CABINET Mohamed BRAHIMI , Avocat Bienvenue sur le site de Maitre Mohamed BRAHIMI, Avocat. Vous y trouverez un blog dédié à la pratique judiciaire et à la vulgarisation du droit

Les infractions de presse contre les personnes et la vie privée d'autrui en droit pénal algérien ( 3e et dernière partie)

mohamed brahimi Par Le 26/03/2017

II. - L’incrimination d’atteinte à la vie privée

de l’article 303 bis 1 du code pénal

L’article 303 bis 1 du code pénal punit d’une peine correctionnelle « toute personne qui conserve, porte ou laisse porter à la connaissance du public ou d’un tiers ou utilise de quelque manière que ce soit, tout enregistrement, image ou document obtenu à l’aide de l’un des actes prévus par l’article 303 bis. ».Les deux articles 303 bis et 303 bis 1 du code pénal sont donc étroitement liés et le deuxième ne peut exister indépendamment du premier.

 

A. - L’élément matériel

L’article 303 bis 1 du code pénal incrimine le fait de «  conserver, porter ou laisser porter à la connaissance du public ou d’un tiers ».Concernant la conservation qui aurait pu intégrer l’article 303 bis du code pénal, le législateur a préféré l’insérer dans l’article 303 bis 1 parce qu’elle constitue en tant qu’acte préparatoire un préalable à la publication considérée comme le véritable danger pour l’intimité de la vie privée.

 L’article 303 bis 1 du code pénal incrimine en deuxième lieu le fait de porter à la connaissance d’une ou de plusieurs personnes les propos ou images préalablement reproduits.Le texte de loi stipule expressément que l’utilisation de l’enregistrement,image ou document peut se faire « de quelque manière que ce soit »,  aussi l’utilisation d’un appareil ou d’un autre procédé technique n’est donc pas necessaire. L’infraction est consommée par le seul fait de montrer manuellement à une tierce personne un enregistrement,une image ou document obtenu illicitement.

 Enfin, s’agissant du fait de laisser porter à la connaissance du public ou d’un tiers un enregistrement, une image ou un document, le législateur a voulu sanctionner l’auteur médiat de l’infraction c'est-à-dire l’auteur indirecte qui, par exemple, par imprudence ou inadvertance a permis à quelqu’un d’autre de rendre public une image ou un document  obtenu illicitement.

Les formes de publication sus-mentionnées (conserver,porter,laisser porter à la connaissance d’une ou plusieurs personnes) doivent concerner des enregistrements,images ou documents obtenus à l’aide de l’un des actes prévus par l’article 303 bis du code pénal.C’est ce que stipule expressément l’article 303 bis 1 du même code.En conséquence,l’article 303 bis 1 ne sanctionne que la diffusion de communications,paroles ou images appréhendées volontairement en violation de l’intimité de la vie privée d’autrui.A contrario,si les paroles captées,enregistrées ou transmises n’ont pas été prononcées à titre privé ou confidentiel ,ou que les images fixées,enregistrées ou transmises représentent une personne dans un lieu public et non privé , ou que dans les deux cas il y a eu autorisation ou consentement de la  personne  concernée,il n’y a pas d’infraction.

B. - L’élément moral

Bien que l’article 303 bis 1 du code pénal n’a pas utilisé le terme «  volontairement  »  comme c’est le cas pour l’article 303 bis,il n’en demeure pas moins que l’élément intentionnel est requis pour qu’il y ait sanction.Cet élément s’analyse en la pleine conscience  de rendre public un enregistrement,une image ou un document obtenu illégalement.Cet élément doit être établi.Mais dans la sphère médiatique, cette connaissance est présumée contre l’éditeur et le directeur de la publication tenus responsables de ce qu’ils ont laissé paraître sans vérifier le consentement des personnes concernées.

III. – Les règles communes applicables aux deux infractions

des articles 303 bis et 303 bis 1 du code pénal

A. - La détermination des responsables

Conformément à l’article 303 bis 1 alinéa 2 du code pénal,lorsque le délit d’exploitation de la parole ou de l’image d’autrui est commis par voie de presse  , les dispositions particulières prévues par les lois y afférentes pour déterminer les personnes responsables sont applicables.Il s’agit ici d’un renvoi au mécanisme de responsabilité prévu par  l’article 115 de la loi organique du 12 janvier 2012.Sera donc  engagée la responsabilité du directeur responsable de la publication ou du directeur de l’organe de presse électronique , ainsi que celle de l’auteur de la prise de son ou de l’image.

Bien que l’article 303 bis 1 alinéa 2 du code pénal vise l’infraction prévue à l’alinéa premier du même article, il va s’en dire que la responsabilité prévue par  l’article 115 de la loi organique du 12 janvier 2012 s’applique aussi aux infractions  de l’article 303 bis sachant que l’article 115 institue un principe général applicable à toutes les infractions de presse.

L’article 303 bis 3 du code pénal reconnaît la responsabilité pénale de la personne morale pour les infractions prévues aux articles 303 bis et 303 bis 1 du code pénal.Pour que la responsabilité pénale de la personne morale soit engagée, il faudrait que l’infraction ait été commise pour son compte par ses organes  (art.51 bis C.Pénal.).En tout état de cause, la personne morale qui fournit sciemment à l’éditeur ou au directeur de la publication le moyen de commettre ces infractions sera sanctionnée.

B. - La tentative

Quelle que soit l’infraction prévue par l’article 303 bis ou par l’article 303  bis 1 du code pénal  , la tentative est punie en vertu des mêmes textes des mêmes peines que l’infraction consommée.

C. - La prescription

Les infractions des articles 303 bis et 303  bis 1 du code pénal sont soumises à la prescription de droit commun mais si elles sont commises par voie de presse écrite, audiovisuelle ou en ligne, elles se prescrivent par six mois révolus à compter du jour où elles ont été commises et ce en application de l’article 24 de la loi organique du 12 janvier 2012.

D. - Sanctions

Les délits prévus par les articles 303 bis et 303  bis 1 du code pénal sont punis par une peine d’emprisonnement de 6 mois à 3 ans et d’une amende de 50.000 à 300.000 DA .En outre et en vertu de l’article 303 bis 2 ,le tribunal peut prononcer en cas de condamnation ,la privation d’un ou plusieurs droits prévus à l’article 9 bis 1 du code pénal pour une durée n’excédant pas cinq ans.Le tribunal peut aussi en vertu de la même disposition ordonner la publication du jugement de condamnation selon les modalités prévues à l’article 18 du code pénal.Dans tous les cas,la confiscation des objets ayant servi à la commission l’infraction est prononcée ( art. 303 bis 2- 2 C.Pénal.) .

En vertu de l’article 303 bis 3 du code pénal, la personne morale peut donc être  déclarée responsable pénalement des infractions définies aux articles 303 bis et 303  bis 1 du code pénal.Si cette responsabilité pénale est retenue, la personne morale encourt une peine d’amende suivant les modalités prévues par l’article 18 bis du code pénal et, le cas échéant, suivant celles de l’article 18 bis 2 (art. 303 bis 3 al.2 C.Pénal).

Maitre M.BRAHIMI

Avocat à la Cour

(+213) (0) 26 83 81 65

(+213) ( 0) 7 71 50 49 57

Email: brahimimohamed54@gmail.com

www.brahimi-avocat.e-monsite.com